17/5/2019
Je suis #mompreneurAuteure : Marie-Ève Trudel-Vibert Je ne regrette pas d'avoir eu un enfant. Je ne regretterais jamais de n'en avoir pas eu. Hélène Ouvrard, L'herbe et le varech Ça y est!
J'ai fait le tour de l'horloge. Les aiguilles ont spinné, laisse-moi te le dire! La petite, la grande, même la trotteuse s'est mise au galop. Y a fallu me remonter, souvent. Des fois à bras, des fois virtuellement. Au premier matin d'une routine flambant neuve, j'ai enfilé mes runnings pour aller courir alors que je suis plutôt de type marche. Je ressentais le besoin de me dépêcher comme pour me prouver que ma décision était la bonne. La vérité, c'est que c'était la seule. Et puis les mois ont passé. L'horloge a sonné les heures. Jusqu'à celle-ci. Je t'annonce que je vais prendre une pause de MAMA Gaspésie. Il y a un an, j'ai quitté non seulement mon emploi, mais mon métier, pour m'entreprendre au grand complet dans un domaine plus artistique. Esthétique. Passionnant. Pas forcément sympathique. Dur, aussi. À l'instar de Piaf, non, je ne regrette rien. Il n'en reste pas moins que le trip est plus houleux que je ne l'avais imaginé. Et je m'étais monté un solide bateau... Je vais te conter, avant de me retirer du blogue pour nourrir des projets qui ne peuvent plus attendre, à quel point j'ai été dropée en plein ciel par un jet qui n'est jamais réapparu. Comment la chute a été toute sauf libre, et ce malgré les dispositifs de sécurité. LES SERPENTS Ma tireuse de cartes l'avait présagé au party de départ organisé par mes collègues; elle m'avait dit que le plus difficile serait de faire face au monde entier, à commencer par le petit monde, celui qui m'entoure, qui ne me veut pas de mal, mais qui m'en ferait pareil. Ce chapitre s'appelle : les serpents. Comme dans la toune du même nom qui figure sur le dernier album d'Alexandre Poulin que j'écoute en boucle avec ma fille. Les temps sauvages. Notre CD de route. Il y a toi rencontré dans une allée de l'épicerie : comment elle va, la vacancière? Il y a moi qui te réponds : je vais bien, merci. Et il y a celle qui aurait voulu répliquer : je suis en vacances dude, ça va bien! Il y a toi qui tentes de programmer une prochaine rencontre à voix haute au lieu de sonder le groupe à l'aide d'un Doodle : oui, ce sera plus facile... puisque Marie-Ève ne travaille plus, ce sera jouable dans cette semaine-là! Il y a moi qui ne te réponds juste RIEN, vu l'acquiescement général. Et il y a celle qui aurait voulu rétorquer : après consultation de mon agenda, je pourrai me libérer dans la semaine des quatre jeudis! Il y a toi qui me connaît pourtant, et qui gratte la plaie ouverte de mon estime : tu fais quoi depuis que tu travailles pus? Il y a moi qui te lâche un : Aye os$%??! Il y a toi qui vas me la refaire, une, deux, trois fois, croyant à notre amitié imperméable. Et il y a celle qui la rendra perméable. Puis il y a toi et cette question sans sourire : aimes-tu ça ta retraite? Il y a moi qui te réponds : oui, c'est une retraite plutôt active. Et il y a celle qui aurait voulu lancer : pis toi, ton chômage, toujours plaisant? Dans mon ventre les serpents... Dans ma tête aussi. Je devais muer. Pas dans ma peau, je suis humaine, mais dans mon esprit. Fallait lui permettre de grandir. Ouvre grand tes oreilles, ami lecteur : si ça ne les concerne pas, les gens se foutent de ce que tu fais de ta vie. Alors faut croire que ça les concernait. Je me suis donc évertuée à expliquer et réexpliquer que je n'ai jamais autant travaillé depuis que j'ai « arrêté » de travailler. Il y a d'autres personnes, plus éloignées, mais curieuses et intéressées qui m'ont questionnée par personne interposée : dis-donc, qu'est-ce que Marie-Ève fait de bon ces temps-ci? Il y a moi qui ne réponds pas par personne interposée. Il y a celle qui aurait aimé jouer le jeu : dis-leur que je retourne aux études! Et il y a ces autres, ces gens bienveillants qui m'ont challengée au lieu de m'étriver (MERCI) : en vis-tu, de l'édition, Marie-Ève? Fais-tu de l'argent avec ça? Il y a moi qui réponds le plus franchement du monde : non, je ne vis pas de l'édition à proprement parler (j'ai une mission indépendante!), et ce n'est pas une ambition à court terme. Je gagne ma vie, ou du moins une minime partie, avec des contrats (autres) que je décroche en tant que travailleuse autonome. Et puis faut dire que mon modèle d'affaires est fabriqué selon que le bénévolat fait partie de 50 % de mes activités. Il y a celle qui n'aurait pas mieux répondu. On ira aussi loin qu'il faut Pour guérir les morsures sur ta peau T'oublieras même les jours méchants Qui ont fait naître dans ton ventre les serpents
Pour clore ce chapitre, disons que les perceptions et les jugements m'ont renversée. Je me suis lancée dans cette aventure-là en étant à la fois d'attaque et terriblement fragile. À la mi-année, j'en suis venue à ne plus reconnaître mon reflet dans le miroir. Et quand on ne se reconnaît plus, on ne reconnait pas l'autre, celui qui nous fixe avec la même brillance au fond des yeux. C'est là que mon p'tit mari m'a confrontée : comment peux-tu être aussi déprimée? Tu as ce que tu voulais! J'AI TREMBLÉ C'est vrai. Je touchais du bout des doigts au Graal. Et je pensais que c'était suffisant. C'est parce que j'avais oublié quel genre de spécimen je suis. Une bibitte, une éponge, une junkie du travail; il s'avère qu'ayant été investie à 150% dans mon ancienne vie professionnelle, je devais baisser ma marge avant de réinvestir ailleurs. Ma première année en solo aurait dû s'entamer en douceur, avec cette intention-là. Quel tour d'horloge je me serais payé! Au lieu, encore intoxiquée, j'ai recréé mon pattern de salariée. Je me suis mise à déroger du plan que p'tit mari m'avait demandé d'échafauder — et que je ne lui ai d'ailleurs jamais livré —, puis j'ai fait passer les demandes des autres avant mes besoins. Mes envies. J'ai pris large. Mes épaules se sont affaissées. Mon dos recourbé. Blessée au haut du corps, j'ai reculé d'égard envers moi-même. Y a des bouttes où me mettre dans ma peau était un sport de combat. Où mon enveloppe ne voulait plus me recouvrir. Mais au moins j'ai tremblé. Je voulais saisir mon existence Puisqu'on n'existe que le temps qu'on tremble On dit que réussir, c'est faire ce que l'on aime. J'ai voulu tout faire. Et je me suis trompée. Depuis 1 mois, je dis NON. Je pleure après. C'est poche dire non. On nous apprend à le crier en caractère gras en cas de danger imminent; et pourquoi ne pas nous en prévenir dans le cadre d'une simple demande, d'un banal service? Dire non, refuser un contrat, décliner une demande, c'est fucking mal vu. Le NON en général est socialement irrecevable. Il signifie pourtant d'établir une relation consensuelle, d'abord avec soi-même... LA FAMILIA Je t'ai parlé de mes serpents, de mes tremblements, et à cela j'ajoute la sphère familiale. Être mieux disposée à m'occuper de cette nouvelle dimension de notre vie, c'était l'épicentre de ma décision de travailler à mon compte. À raison, je pensais que ce serait plus simple de faire face à toutes les petites et les grandes choses du train-train quotidien en transformant notre bungalow en QG des 3 sista : rendez-vous médicaux, virus impromptus qui nous clouent au lit, fériés, pédagos, ménage, courses, activités au CPE et la longue liste d'etc. Effectivement, c'était plus stratégique. Mais côté business, je n'avais pas réfléchi au fait que mon horaire allait étrangement ressembler à celui d'une personne salariée. À mon ancien horaire. Avant, ma louve partait à 8 h pour le CPE et j'allais la récupérer à 16 h. Maintenant, c'est le même scénario. Ce sont les mêmes huit heures. Oui, je les passe à développer mon entreprise, mais dans ce canevas d'heures là, il y a quand même l'organisation des repas, les brassées, la gestion des activités... tout ce qui s'appelle le travail invisible. Et à moins d'une formule magique pis de la baguette qui va avec, je ne peux dupliquer ces heures. Encore moins subir une duplication. C'est le temps de te parler du titre choisi pour cet article : Je suis #mompreneur. « Mom » pour maman, « preneur » pour entrepreneur. Un mot qui se prononce mal, mais qui définit bien les mamans qui se lancent en affaires après avoir donné la vie. Pourquoi? Parce qu'elles ont revu leurs priorités et qu'elles souhaitent travailler autrement. Vivre autrement. En ce qui me concerne, l'aventure de l'entrepreneuriat était amorcée avant celle de la maternité. Mais ma liberté d'action et de temps me tenait loin de tous accommodements. Ce qui me plaît dans le mouvement « mompreneur », c'est que je me reconnais au moment présent et que ça vient dresser les contours de mon nouveau métier. Depuis peu, je m'approprie le terme et utilise le mot-clic #mompreneur sur les réseaux sociaux; par contre, je n'ai pas rejoint l'une de ces communautés de mompreneurs ni payé les frais d'adhésion qui y sont attachés. Ce n'est pas ce que je recherche. Mais que je le veuille ou non, mon nouveau modèle est calqué sur le leur : à partir de maintenant, j'avancerai en ajustant mes attentes, en les adaptant à ma réalité, je définirai mes priorités personnelles et professionnelles et je focaliserai dessus tout en respectant les règles d'une certaine productivité et tout en n’oubliant pas de souffler, un peu, quelques minutes par jour. Par ce titre qui me colle à l'esprit, je sais que la professionnelle que j'étais n'existe plus. Que je vis l'émergence d'une nouvelle identité. Être une mompreneur, c'est être une maman avant tout. J'étais une entrepreneure en devenir. Je suis une mompreneur à temps plein. Ça change la game. Ça me change moi. Et tout est clair. Récemment, j'ai découvert une autrice qui m'a scié les jambes. Tu sais... le concept de faire œuvre utile!?... La littérature n'y échappe pas. Hélène Ouvrard, dans L'herbe et le varech, a redimensionné ma réflexion sur la maternité. Si deux absolus te déchirent, attends que l'un te paraisse plus absolu que l'autre. La vie est là pour nous faire renoncer à nos désirs, pour nous forcer à choisir. Elle est remplie d'êtres qui ont obéi, finalement. Vivre et écrire n'est plus possible. Je le sais maintenant. Si j'ai un autre enfant, je ne ferai jamais l'œuvre que je porte. [...] L'amour d'un enfant est un absolu. Il faut y répondre par l'absolu ou par rien du tout. Il n'y a pas de moyen terme. [...] Car cette enfant d'un mauvais rêve dont je ne me suis pas éveillée parce qu'il était la vie même, cette enfant qui n'aurait peut-être pas dû naître pour que je fusse écrivain, cette enfant m'a mise au monde en naissant. Merci Hélène, quand faut y aller faut y aller. FALLAIT Y ALLER Il est midi ou minuit. Le tour de l'horloge est complété. Je m'en vais de ce pas m'occuper de trois projets qui me sont chers, dont deux en écriture. Je m'en vais écrire. Si tu me suis sur Instagram, tu sais que le personnage qui m'habite, ma Jamie, est en crisse. Je t'avoue que je vaque à plusieurs occupations dans le même état, pleine d'elle. Je dois lui accorder du temps et de l'amour avant qu'elle ne me passe une volée. Je vais te revenir en forme. Avec des mots plus justes. J'espère que tu vas être là. Et j'espère pouvoir te casser les oreilles avec les détails de deux livres à publier. Les trois prochains mois et demi, je vais essayer d'être juste assez. Pour moi. P'tit mari. Ma louve. Être juste assez. Je suis une MAMA Gaspésie. J'ai tant voulu l'être. Tu m'as permis d'y arriver. Merci. I waited all my life, cette fois-là il fallait y aller Désolé, mais pas désolé, cette fois-là il fallait y aller. Vaut mieux être soi-même que d'être mal accompagné. (J'aime Loud!) Bye la! |
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