Auteure: Maélie Dufresne « Le deuil est le prix que nous payons pour l’amour. » - C.S. Lewis Bébé, Bien que tu n’aies jamais été physiquement là, ta présence, elle, était bien réelle. Dans mon coeur. Dans mes maux de coeur. Dans le coeur de ton père. Dans le futur de tes grands-parents. Dans le présent de ma fatigue, de mes sautes d’humeur, dans mon dégoût de toutes ces choses qui n’ont jamais su me révulser autant. Tu étais là, à chaque envie folle que j’avais de dépenser trop d’argent dans du linge pour bébé, dans tous mes cravings et mes rages de sucre. Dans chaque nuit où je suis restée debout, incapable de digérer, car toute mon énergie était concentrée sur toi. Tu étais là, dans chacune de nos conversations, dans tous les soirs où on ne s’est pas couchés parce qu’on ne s’entendait pas sur un nom pour toi. Dans notre imaginaire, où je t’imaginais floral et ton père, eh bien, en garçon. Tu étais là, dans les surprises qu’on t’avait déjà offertes, tous les gens qui t’aimaient déjà beaucoup, et nous. En réalité, le seul endroit où tu n’étais pas, c’est dans mon ventre. Mon bébé, tu n’étais pas dans mon ventre. Quelques mois avant ton absence, nous avons pris la décision que nous étions prêts. Prêts à ce que ça arrive, à ce que tu arrives. Les trois premiers mois où j’ai continué à avoir mes règles... Chaque fois, la déception était écrasante. Elle remplaçait tout le reste. La joie, le bonheur, tout ce que j’avais à dire. C’était un vendredi. Ça faisait six jours que j’avais du retard. J’attendais le septième jour pour faire le test ; les déceptions passées me faisaient appréhender le résultat, et j’essayais du mieux que je pouvais de ne pas trop m’emballer. Mais ton père, mon bébé, est un homme qui remarque. Il savait que j’étais supposée avoir eu mes règles cette semaine-là, que je n’avais pas eues. J’ai tenté de le cacher et de repousser le moment, jusqu’à ce que je réalise que ce n’était pas nécessaire. Si tu étais en train de grandir dans mon ventre, je ne voulais plus attendre avant de le savoir. J’ai attendu UNE longue heure que ton père arrive du travail pour lui annoncer la nouvelle : mon test de grossesse était positif. À cet instant déjà, en sachant pertinemment que tu n’étais supposé mesurer qu’un demi-centimètre, je te voyais déjà grand(e), né(e), en forme. Plein(e) de vie, de compassion, de rires, d’intelligence, de répartie, de taches de rousseur. Je te voyais VIV(R)E, nous éblouir, nous émouvoir, nous ramener à la base de la vie : l’amour. C’est bien ce que je m’attendais à voir, le jeudi matin où mon échographie de datation allait nous dire si oui, tu naîtrais bel et bien en même temps que ton papi, à l’automne. J’aime tellement l’automne. Le 31 mars 2019 Mais, mon bébé, je ne t’ai pas vu. Je ne t’ai pas vu, car tu n’étais pas là. Tu étais toujours aux mêmes endroits, notre coeur, celui de tes grands-parents, de ta future marraine et tes tantes qui m’écrivaient tous ce matin-là pour avoir de tes nouvelles. Mais, sur cette photographie de mon ventre, que la technologue ne cessait de qualifier de « pas une grossesse de 10 semaines », toi, tu n’étais pas. Le sac de grossesse qui t’aurait abrité, nourri, gardé au chaud, secouru, réconforté, qui aurait été ta maison pour les sept prochains mois, qui te liait, violemment et non sans douleur à moi, lui, était là. La poche de protéines qui aurait assouvi ta faim les premières semaines, en attendant que tu découvres patiemment les aliments que je choisissais avec soin pour nous, était là aussi. Tout était là, mon bébé. Tout, sauf toi. En regardant le trou noir qui remplissait mon utérus, en tentant de comprendre ce que ça signifiait, je pensais à toi, mon bébé. Je m’inquiétais pour toi. Je craignais qu’il te soit arrivé un malheur. Que tu te sois perdu dans l’immensité de l’univers qui s’était ouvert à toi. La gentille médecin qui m’a expliqué la raison de ce vide était humaine et compatissante. Mais bien qu’elle fut douce, et qu’elle nous répétait que c’était fréquent, qu’une femme sur cinq vivait la même chose que moi, je ne crois pas qu’elle comprenait. Elle ne réalisait pas. Elle ne voyait pas en nous, en notre coeur, ne voyait pas ta petite chambre que nous avions déjà commencé à aménager. Elle ne savait pas que, pendant tout ce temps où tu ne me remplissais pas de toi, nous, on se remplissait de toi. Elle ne savait pas que derrière les quelques larmes versées se cachait le plus grand mal qu’on n’ait jamais ressenti. Qu’en moi, apprendre ton absence, c’était un traumatisme qui remettait à mes yeux tout en question. Ma capacité à t’accueillir, la facilité que nous aurions, ton père et moi, à avoir un bébé qui ne serait pas toi. Et qui, avec chance, serait là, lui. J’ai eu peur. Peur de ne pas être à la hauteur. Peur de ne pouvoir faire ce bonheur à ton père, qui, depuis si longtemps, t’attendais. Toi, ou n’importe quel bébé qui acceptera de grandir à l’intérieur de mon ventre. Pour qui, comme pour toi, je me consacrerai entièrement. Ferai tous les sacrifices nécessaires. Accepterai tous les maux. Par amour. Pour lui, pour toi, pour nous. Je t’ai cherché, mon bébé. Dans le couloir me menant à la chirurgie qui allait m’enlever ton sac de grossesse. Je t’ai cherché à mon réveil. Car rien n’est plus dur à accepter que l’inacceptable. Que l’amour déjà donné a été vain. Où que tu sois, mon bébé, sache ceci. Tu étais voulu, désiré, aimé. Tu aurais été bercé, cajolé, aimé. Tu laisses dans nos vies une marque au fer, de la douleur la plus vive qu’on n’ait jamais vécu. Tu laisses au prochain bébé, qui avec espoir choisira de vivre en moi, un avenir empli d’amour, de soin, de prudence. D’encore plus de bonheur qu’il n’en aurait été possible autrement. Pour lui, je te dis merci. Pour nous, je te dis adieu. Même si tu n’as pas vécu physiquement en moi, nous porterons le deuil de l’espoir et du bonheur dont tu nous as comblés durant les huit dernières semaines. Certainement, on ne t’oubliera jamais. Avec amour, Maman ***
Un oeuf clair signifie qu'il n'y a pas d'embryon qui s'est implanté dans le sac de grossesse lors de la nidation. S'il ne résulte pas en fausse couche, l'oeuf clair n'est visible que par échographie. En apprendre plus à ce sujet. |
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Novembre 2020
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