Auteure invitée : Marie-Claude Sauvageau Gaspésienne de naissance, mais née de parents exilés ici avant ma naissance. J’ai abouti à Rivière-au-Renard il y a plus de 20 ans avec ma petite famille d'alors. Mes racines sont ailleurs, mais mes branches se sont déployées ici, et ce, depuis plus de 40 ans. En Gaspésie, j’ai à mon tour semé mes rejetons. Et je suis maintenant maman de deux jeunes adultes de 22 et 19 ans.
En 2011 ma vie, telle que je l’avais connue est disparue. Tout mon quotidien a été chamboulé. Ce n’est pas parce dorénavant, j’étais une maman monoparentale une semaine sur deux. Ce n’est pas non plus le fait que je devais à présent m'occuper seule de ma maison. Non. Loin de là. Je suis tombée malade. Précisément, j’ai reçu le diagnostic de sclérose en plaques maladie neurologique dégénérative incurable. Bang ! Voilà ! Ma vie s’est renversée et bouleversée à jamais. Ce que j’ai envie de partager avec vous, c'est la beauté et la force de l'entraide des Gaspésiens. Je ne suis la fille de personne ici. Je n’étais plus la femme de personne non plus... Pourtant, au cours des premières années de la maladie, je me suis sentie comme une fille d'ici, la fille de tous et la femme de chacun. Sans le soutien de ma communauté, je ne sais pas comment j'aurai pu passer au travers. J’ai toujours dit que j’avais des amis et que je pouvais les compter sur les doigts d’une seule main, mais que j’avais beaucoup de copains et de connaissances. Habituellement, on prend peu de temps à se demander qui sont nos amis, surtout quand les choses vont bien. Certaines personnes font partie de notre vie et sont comme des pantoufles confortables. Elles nous accompagnent dans chacun de nos pas. Vous savez, ces vieilles galoches qu’on ne changerait pour rien au monde ? Elles vivent avec nous et sont à l’origine de notre bonheur. Vous n’avez pas à vous poser de questions. Vous savez que peu importe le chemin que vous prendrez, elles seront là. Si vous vous cognez le gros orteil sur une patte de table, elles vous protégeront. Si vous marchez dans la rosée, elles absorberont les larmes. Pour ces pantoufles-là, c’est un acquis, une certitude de votre vie. Puis, il y a ceux que je considérerais comme des souliers de travail. Ils partagent une partie de votre vie, vous suivent dans votre quotidien. Ils sont relativement assez intimes avec vous pour prévoir dans quelle direction vous irez, ce que vous entreprendrez et ce qui vous transportera. Vous ne les ramenez pas tous les jours à la maison, mais quand ils y viennent, les choses sont simples. On est pas là pour se marcher sur les pieds… On entreprend de belles randonnées sur le sentier de l'amitié. Puis, il y a les chaussures de soirée. Celles-là vous accompagnent lors de vos sorties. Elles suivent vos pieds là où c’est possible de danser et de voir des gens. Plus ou moins confortables, dépendant de la soirée et du nombre de pas que vous effectuerez. On se prête au jeu, le temps d’une soirée ou deux et on change de modèle. Puis pour une autre occasion, on les remet avec plaisir. Toutefois, je me suis aperçue, que j’avais dans ma vie, toute une garde-robe pleine de souliers et de pantoufles. Que ces souliers soient de travail, de soirée ou de confortables galoches, ils m’ont tous apporté du réconfort dernièrement. J’ai même découvert que certains avaient des propriétés apaisantes. J’apprenais alors, à découvrir ces vertus en même temps que ma situation évoluait. Parce que chose certaine, si moi je me sentais sur pause…tout bougeait très rapidement. En l’espace de 37 jours, je me suis rendue 14 fois à l’urgence. J’ai fait deux visites chez l’optométriste. J’ai vu un médecin interniste, un ophtalmologiste, passé 3 scans, des radios, une résonance. Je me suis payé une réaction aux médicaments qui m’a valu un voyage en ambulance un soir de tempête. J’ai reçu des injections aux 6 heures pendant 72 heures… Un nombre incalculable de prises de sang, une quantité monstre de médicaments et de tralala. J’ai déménagé mes plumes chez mon amie pour faciliter mes traitements et pour essayer de récupérer un peu. Et j'étais toujours sur la touche. J’apprenais, certes, mais je commençais aussi à comprendre que je devais lâcher prise. Je ne pouvais plus tout contrôler et je me devais de laisser les autres prendre certaines parties de ma vie entre leurs mains. Et ça! C’est pas évident! On ne veut pas faire pitié. On ne veut pas pleurer devant les autres. On ne veut pas avoir à demander de l’aide. On voudrait y arriver par nous-mêmes. Mais c’était totalement impossible. J’avais beau me dire que si mes amis avaient besoin de moi, j’aurais fait n’importe quoi pour eux, ça devient autre chose quand le contraire se produit. On est parfois mal fait. On veut pas déranger, on veut pas obliger, on veut surtout pas montrer qu’on a peur et qu’on a besoin d’aide. Il me semble que la vie serait tellement plus facile si on arrivait à tout faire par nous-mêmes. Mais ce n’est pas ainsi que ça fonctionne. Ça, je le savais, mais maintenant, j’en étais persuadée. De la fille indépendante que j'étais (oui celle qui avait fait son plancher de bois franc et posé de la céramique) je devais demander qu'on m'organise et qu'on m'aide. J’ai vu des dizaines de mains se tendre vers moi. Des mains venant de tous les horizons. Des connaissances de longues date et de simples spectateurs. Chacun à leur façon, ils ont réussi à toucher une partie de ma douleur et à la diminuer. Un sourire, un câlin, un bon mot, une visite, un petit plat déposé à la maison, un escalier pelleter, un taxi pour mes enfants, une boite remplie de bouffe pour la semaine, une salle de bain en pleins travaux gentiment refaite par des amis, un souper spaghetti, un marché aux puces, un spectacle-bénéfice, et j'en passe. Une multitude de personnes proches, une tonne de connaissances, des dizaines d'inconnus m'ont aidé à porter mes pas un peu plus hauts, un peu plus loin. À travers la multitude de godasses que j'ai croisée, chacune a pris un petit peu de poids que j'avais dans mes propres souliers pour faciliter cette traversée pénible. Il va sans dire que si j'avais habité la grand'ville, toute cette aide ne se serait sans doute jamais manifestée. Les gens d'ici sont des gens de cœur, des gens vaillants. Ils ont fait tout avec rien, ils ont buché, pétri, défriché, frotté. Ils ont bâti leur coin de rêve avec une des plus belles valeurs qui se puisse, la solidarité. Être Gaspésiens et Gaspésiennes c'est aussi avoir le cœur aussi grand que la mer, les bras aussi fort que le vent et une personnalité aussi tenace que la forêt qui pousse malgré les malgrés. Chaque Gaspésien, chaque Gaspésienne a toujours dans ses bottines, une petite place pour transporter un morceau de roche du soulier de son voisin. |
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Juillet 2021
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